Vous vous souvenez peut-être de l’époque où PokerstarsSports lançait ses fameuses “grosses cotes boostées” avant chaque journée de Ligue des champions ou de Ligue 1. Des cotes totalement incroyables publiées trois jours avant les rencontres, et qui restaient intactes jusqu’au jour des matchs. Je pense par exemple à ce genre de boost : 31 août 2020 : “Monaco et Saint-Étienne vont gagner”, affiché à 7.00, alors que la cote réelle aurait difficilement dépassé 3.5 ou 4.0. En prime, grâce aux failles du site, il était possible de parier la mise maximale toutes les 24 heures. Nous n’étions pas loin du bonheur me diriez-vous si nous comparions à maintenant.
C’était en 2020, et les bookmakers manquaient de réactivité. PokerstarsSports proposait alors les meilleures cotes boostées que l’on ait jamais vues, tandis que Betclic offrait des boosts à 20€… Mais cette époque est désormais révolue. Quatre ans plus tard, PokerstarsSports est tombé dans l’oubli, Betclic ne propose plus que des boosts à 10€, et une grosse cote boostée rentable ne dure plus que 30 secondes en moyenne. Le secteur évolue à une vitesse fulgurante, et c’est justement de ces récents changements et des dernières actualités dont nous allons parler dans cet article.
Il y a comme une ambiance de transition en ce moment, et je ne vous cache pas que j’aurais préféré vous annoncer de meilleures nouvelles.
Winamax ne veut plus que tu mettes ta daronne à l’abri !
Commençons par l’affaire Winamax, qui a suscité de vives réactions sur Twitter et dans la communauté des parieurs gagnants. En résumé, Winamax a récemment lancé une campagne de bannissements, ciblant principalement ses joueurs gagnants. Jusqu’à présent, Winamax se contentait de bannir les joueurs pratiquant le surebet. Petite précision : il ne faut jamais faire de surebet sur un même bookmaker, mieux vaut toujours le faire entre plusieurs plateformes.
Cette fois-ci, cependant, Winamax a banni un bon nombre de joueurs pour des raisons assez floues. Les conditions générales de vente (CGV) des bookmakers sont si vastes et ambiguës qu’elles couvrent une multitude de points, ce qui leur permet toujours de trouver un motif, même contestable, pour “justifier” un bannissement.
Betclic n’a pas tardé à suivre, en procédant également à un “tri” de ses joueurs, en se concentrant également sur les joueurs gagnants bien sûr. Betclic est même allé plus loin que Winamax en ne restituant pas toujours le solde des comptes des joueurs bannis, en invoquant des accusations de fraude.
Alors que les parieurs avaient remporté plusieurs batailles au fil des années, comme l’obligation d’être payés en cas d’erreurs de libellé ou de cotation, la situation semble aujourd’hui se dégrader.
Dans un rapport d’activité de 2023, l’ANJ avait déjà signalé que les bookmakers devaient justifier les motifs de blocage ou de bannissement d’un compte joueur. L’ANJ « soulignait que les opérateurs devaient préciser les éléments factuels retenus pour caractériser le grief constituant le motif de la décision de clôture ou de blocage d’un compte afin de permettre au joueur de pouvoir contester la matérialité des faits ou/et leur qualification et ainsi, d’engager un débat contradictoire préalablement à une éventuelle saisine du médiateur ». Beaucoup de mots compliqués pour, au final, peu (pas ?) d’impact concret dans la réalité.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’existe aucune procédure de contrôle des clôtures abusives de comptes joueurs. On espère vivement que cela changera et que l’ANJ finira par encadrer les blocages et bannissements de comptes, en se basant sur une liste des motifs définis et qui devront être prouvés par le bookmaker. Mais bon, j’avoue que je rêve un peu.
Toc toc toc, c’est l’état
Autre mauvaise nouvelle : le gouvernement envisage de renforcer son emprise sur les jeux d’argent et il n’y va pas de main morte puisque de 387 millions d’euros de prélèvement sociaux les opérateurs français devront reverser 535 millions d’euros en 2025 (soit une augmentation de plus de 38%, voir graphique ci-dessous). Comme toujours lorsqu’un secteur connaît une forte croissance, l’État attend patiemment derrière la porte pour prendre sa part, et si possible la plus grosse possible. Malheureusement, cela va souvent trop loin et finit presque toujours par briser la dynamique. C’est exactement ce que nous allons explorer en détail.
D’abord, il faut souligner que ces mesures d’augmentation significative des taxes (notamment les prélèvements sociaux) sont imminentes. Elles devraient entrer en vigueur dès 2025 et toucheront non seulement les paris sportifs, mais aussi le poker, les casinos et les loteries. Quant à la justification, elle est assez classique : vous avez généralement trois options au choix :
- A/ Pour les retraites
- B/ Pour la sécurité sociale
- C/ Pour l’éducation
Dans ce cas, c’est la réponse B, la sécurité sociale, qui a été mise en avant. Comme on dit, plus c’est gros, mieux ça passe.
Il s’agit d’un changement assez majeur pour toute l’industrie du jeu d’argent. Pour preuve, l’action boursière de La Française des Jeux (FDJ) a chuté de 6 % jeudi dernier. Le secteur le plus impacté par cette hausse de taxes sera celui des paris sportifs.
La France est déjà l’un des pays les plus lourdement taxés dans le secteur des jeux d’argent, et ce, même avant la hausse massive qui se profile. Il est donc inévitable que les parieurs en ressentent les effets.
Tout ce que je vais évoquer à partir de maintenant reste purement hypothétique. Pour faire face à cette taxation de plus en plus lourde, les bookmakers n’auront probablement pas d’autre choix que de réduire encore le taux de retour aux joueurs (TRJ), qui est déjà peu avantageux en France. Bien sûr, ils continueront à sauver les apparences lors des soirées de Ligue des champions ou des grandes affiches des championnats majeurs, en proposant des TRJ plus attractifs. Mais dans l’ensemble des marchés qu’ils proposent, il faut s’attendre à une baisse généralisée.
On peut également redouter une dégradation supplémentaire des promotions et des cotes boostées. Peut-être que leur fréquence ne diminuera pas, mais la rentabilité de ces offres, elle, sera nettement moins intéressante, comme c’est déjà le cas. L’âge d’or des promotions dans ce secteur est clairement derrière nous.
Nous nous dirigeons à grands pas vers un marché des jeux ultra-régulé, à l’image du modèle belge. Cela entraînera inévitablement une hausse du nombre de joueurs se tournant vers des bookmakers étrangers, qui offrent des cotes bien plus attractives. C’est plutôt ironique, car l’ouverture à la concurrence en 2010 par l’ANJ (mettant fin au monopole de la FDJ et du PMU) avait pour but de dissuader les joueurs français de se tourner vers l’étranger, afin de les garder sous le contrôle du régulateur (pour de bonnes raisons parfois).
Il faut bien comprendre qu’un joueur qui ouvre un compte à l’étranger, souvent via un broker (un intermédiaire), échappe totalement aux radars de l’ANJ. Il n’a alors plus aucune protection et ne contribue plus aux recettes fiscales françaises. C’est en quelque sorte le pire scénario possible pour le secteur des paris sportifs en France.
Je n’ai aucune idée précise du volume de joueurs qui, à long terme, choisiront de parier partiellement ou entièrement sur des opérateurs étrangers. J’imagine que ce facteur a été pris en compte avant de mettre en place cette réforme fiscale, mais il ne faudrait pas que ce volume devienne trop important.
Pour conclure :
Pas simple d’être un parieur et encore moins un parieur qui fait des gains (même minimes). Il est clair qu’aujourd’hui les bookmakers ont presque les pleins pouvoirs et ils n’hésitent plus à les utiliser. Ils peuvent bannir des joueurs à leur discrétion, sans fournir de justification, et ce, de manière assez massive. À cela s’ajoute l’impuissance regrettable de l’ANJ, le régulateur, qui est rarement présent lorsqu’on a besoin de lui. Cette absence de régulation ne fait qu’encourager les bookmakers à poursuivre et intensifier leurs pratiques abusives.
En parallèle, la restructuration fiscale prévue pour 2025 va accentuer la pression sur les opérateurs, qui répercuteront sans aucun doute ces contraintes sur les joueurs : des TRJ encore plus bas, des promotions de moins en moins intéressantes, et probablement une chasse encore plus accrue aux joueurs gagnants.
Finalement, les bookmakers ne diffèrent pas tant que ça de leurs homologues des casinos. La seule consolation pour nous, joueurs en ligne, c’est de ne pas avoir à craindre les hommes de main dans l’arrière-salle (pour le moment) !
Pour finir, voici quelques conseils simples (mais que beaucoup oublient, moi y compris) :
- Ne laissez que le strict minimum sur vos comptes de bookmakers. Votre solde n’est pas en sécurité chez les opérateurs.
- Convertissez régulièrement vos freebets, bonus et miles, car en cas de bannissement, tout cela est perdu.
- Méfiez-vous des paris à long terme qui immobilisent vos fonds : si votre compte est banni, il sera difficile (impossible ?) de récupérer l’argent engagé.
- Si vous subissez un bannissement abusif, n’hésitez pas à partager votre expérience sur Twitter, les autres réseaux sociaux et à l’ANJ. Plus il y aura de bruit, plus il y aura de chances que l’ANJ finisse un jour par réagir et impose enfin des règles claires aux bookmakers en matière de bannissements/blocage de comptes joueurs.
J’espère que cet article vous aura plu, même si les nouvelles concernant le secteur des jeux d’argent en France ne sont pas très réjouissantes. Ce n’est bien sûr qu’un petit résumé des actualités et de la situation, il y aurait encore plein de choses à dire. Si vous avez subi un ou plusieurs bannissements et que vous voulez compléter avec votre expérience, n’hésitez pas à laisser un commentaire, c’est toujours très utile !